Un renard à mains nues

Emmanuelle Pagano

Language: French

Publisher: P.O.L

Published: Apr 4, 2012

Description:

Les personnages de ces nouvelles ne se trouvent pas au milieu du récit, ils restent dans les marges, ils se tiennent au bord de leurs vies, de leur maison, de leur pays, ils marchent au bord des routes, à côté de leur mémoire, à la lisière de l'ordinaire et de la raison, comme il leur arrive de faire du stop : au cas où on s'arrêterait pour les prendre. Je les ai pris dans mon livre.

Revue de presse

Avec une écriture animale, Emmanuelle Pagano s'invite au côté des révoltés et des solitaires. Une trentaine de petites histoires pour un grand «roman». Le mot «nouvelles», qui griffe les rainures blanches de la couverture, est-il vraiment approprié ? Oui, à condition de l'entendre au sens postal du terme. Ecrites sans une once de gras, sans sécheresse non plus, ces histoires volées s'échangent des nouvelles, sur les uns, sur les autres. Elles se connaissent et se parlent à l'aveugle, en toute urgence éplorée, en toute sensibilité vagabonde, de belles personnes, tapies dans leur coin...
Tous sont des grands solitaires, des évadés en cavale, des révoltés qui prennent le maquis. Tous imposent leur loi silencieuse, ravagent par leur hargne secrète. De ces guerriers de l'ordinaire, la romancière narre les hauts faits avec tant de nerf et de sollicitude qu'ils deviennent en quelques lignes d'indispensables compagnons de route...
Par la grâce de son écriture mouvante et animale, Emmanuelle Pagano suit les instincts rentrés, assouvit les désirs étouffés. Au fil de chapitres très courts, elle déroule des pans de vie essentiels, puis les enroule à nouveau sur eux-mêmes, sans faux plis, débarrassés de la honte et de la douleur. Elle tisse des liens entre les êtres, croise les destins, recoupe les malheurs, confronte les renaissances. (Marine Landrot - Télérama du 2 mai 2012)

Emmanuelle Pagano sait faire fiction du plus fugace souvenir. Son oeuvre gagne ainsi sa cohérence, évidente dans le recueil " Un renard à mains nues "...
Son Renard à mains nues, qui vient de paraître, est comme écrit après le cataclysme. Une fois que le flot s'est retiré ou presque. Le limon qui en reste est fait de souvenirs. Depuis Pour être chez moi, le roman-récit qu'elle avait publié il y a dix ans déjà sous le nom d'Emma Schaak aux Editions du Rouergue, Emmanuelle Pagano fait son imaginaire des moindres scories du temps. Elle n'a rien oublié des peurs et des élans d'enfance, des révoltes adolescentes, des affrontements, des mises à l'écart où conduisent parfois les choix d'une jeune vie. Elle sait se rappeler aussi les bonheurs d'évidence, avançant à pas d'herbe dans une nature bruissante, agitée d'insectes, frémissante d'oiseaux. Ses émois et ses effrois sont gardés entiers dans son écriture...
C'est envoûtant de calme et de douceur étranges. C'est beau. Si simplement. (Xavier Houssin - Le Monde du 3 mai 2012)

L'auteur se fait «stéréoscope ambulant» des esseulés, des endeuillés, des demeurés. Parce que ces boiteux qui vivent dans les franges prennent la parole depuis un arrière-pays, l'ici et maintenant transversal de la marginalité, leur voix altérée nous parvient à l'oblique, d'espaces transitoires : «Nous sommes encerclés, nous marchons au centre d'une accumulation de petits bouts du monde, des impasses.» Un château du Moyen Âge pillé pierre à pierre, une usine désaffectée peuplée par les esprits de l'asphalte - cette topographie organique, intuitive, dit les remugles d'une ville d'après la ville, théâtre de dépeuplements et délogements : les récits tracent ces confluences, ces interstices, «quand un monde étranger s'invite dans le nôtre». Avec une «curiosité attendrie, indiscrète et suffoquée», les narrateurs de ces nouvelles retracent de drôles de rencontres, dessinant des ponts d'une histoire à l'autre. Comme dans la trilogie filmée de Lucas Belvaux - Un couple épatant, Cavale, Après la vie -, le personnage secondaire d'un récit peut devenir la figure principale d'un autre...
Sous nos yeux émerge une mappemonde existentielle, qui fait surgir tête-bêche le regard conjoint de celui qui observe et de celui qui est observé. (Juliette Einhorn - Le Magazine Littéraire, mai 2012)